Itinéraire d’un IRONMAN – Roth –

Et voici le débrief habituel de Forian Bourgy pour son 2e IronMan de l’année mais surtout pour un nouveau record personnel avec 10h44min32s et il se permet de boucler le marathon en 3h37 après avoir essuyé quelques revers en natation et vélo.
Itinéraire d’un IRONMAN… vraiment pas comme les autres.
Samedi, retrait des dossards et dépôt du vélo. Le site est immense et l’organisation rodée : il y a un nombre incalculable de bénévoles qui renseignent, aident et sont disponibles à la moindre demande. Le décor est planté sous les orages du samedi après-midi : d’énormes files d’attente pour rentrer dans le parc à vélo, mais tout est néanmoins assez fluide. Je suis prévoyant et protège mon vélo avec des sacs pour les pluies annoncées du soir… Spoil : les sacs seront enlevés par l’organisation, et le vélo noyé le lendemain matin. Je suis venu à Roth pour vivre Roth. Vivre ce qui est considéré comme le plus gros triathlon du monde. Comme celui avec l’ambiance et l’organisation la plus dingue. Tout a été préparé, mais je n’ai pas analysé outre mesure le parcours vélo par exemple, pour me laisser des « surprises ».
La nuit du samedi au dimanche se passe exceptionnellement bien pour une nuit d’avant compétition. Les conditions sont presque idéales : peu de vent, pas de pluie annoncée et une température autour de 20-21 degrés au maximum de la journée. Les jambes des derniers jours sont excellentes, je suis enfin à peu près rétabli, bref tout est réuni pour que tout se passe parfaitement.
Mais comme je le répète sans cesse : ce qui est « beau » dans ce genre d’épreuve, c’est qu’il peut se passer 1000 choses différentes : niveau mécanique, physique et climatologique. Je redoute le premier aspect, ce sont finalement les deux suivants qui vont entrer en scène…
Nous sommes + de 4000 à prendre le départ, étalés en vagues de 200 toutes les 5 minutes. Je suis dans la dixième vague, et il est enfin temps de se jeter dans le Danube. Au moment de descendre, première déconvenue, je m’ouvre un petit peu le doigt… bon, avec la natation, ça aura le temps de cicatriser, ça va. On part donc pour 3800 mètres : il est difficile de nager au départ, mais tout se fluidifie au bout de quelques centaines de mètres. Tout se passe normalement, même si j’ai un peu froid malgré les 21 degrés et la combinaison. Jusqu’aux 3000 mètres… et une crampe dans le mollet droit, début des déconvenues. Je me mets sur le dos, fais tout pour la faire passer, mais rien n’y fait. Je nage les 800 derniers mètres « à l’arrache », ça tire et j’espère que ça va passer à la sortie natation.
Sortie de la natation : je ne peux pas courir, et je peine à marcher. Je suis gelé et je galère à mettre ma tenue pour le vélo, avec les dents qui claquent et tout ce qui s’ensuit. C’est pas forcément le début espéré, mais oui, il y a des aléas, et il faut faire avec. Après avoir mis la crème solaire (belle erreur), c’est parti pour le vélo… et ça tire toujours autant dans le mollet.
Pour parfaire le cocktail de bonnes surprises, on ajoute un soupçon de pluie. Puis encore de la pluie. Et encore. Pendant un tour de 90km, de la pluie. Je peine à me réchauffer, les routes sont rapidement trempées et certains virages dangereux, un participant tombe dans un virage devant moi… et le mollet m’empêche de rouler correctement. Je n’arrive pas à appuyer correctement en position aéro…
Ce qui commence à faire beaucoup… A peine 2-3 heures de course et mentalement c’est déjà compliqué. Surtout que je devrais m’arrêter en tout 4 fois pour « satisfaire un besoin naturel » comme ils disent en vélo… pas de problème d’hydratation en tout cas…
La partie qui devait être la plus plaisante se transforme en cauchemar, et je me dis que perdu pour perdu, l’objectif c’est de terminer, et on va profiter un maximum de l’ambiance folle du vélo, parce que c’est Roth, quand même ! Je m’éclate avec les spectateurs, les photos. Du monde dans tous les villages, des animations, et la montée de Solarberg, celle qu’on voit sur toutes les vidéos… qui donnent des frissons quand on sort du virage et qu’on voit les milliers de personnes sur le bord de la route ! Le passage, littéralement dans la foule, se fait vélo par vélo, avec les cris et les encouragements qui font tout oublier l’espace de quelques secondes. Comme un col du Tour de France… et mieux encore que sur les vidéos.
Le deuxième tour est plus sympa : la pluie s’est arrêtée, les routes sèchent, même si ça va toujours pas mieux pour le mollet. L’objectif est d’arriver autour de 7h de course au parc à vélo, il restera alors 8h30 pour faire le marathon si je ne peux pas courir. Même en marchant, aucun soucis pour finir.
Enfin la transition et je boucle le vélo en 5h34, à 32km/h de moyenne. J’en espérais 2 de +. C’est mon pire classement niveau sport aujourd’hui, pourtant dans ma discipline de prédilection…
Le marathon arrive… en descendant du vélo, difficile de courir… mais on va tout faire pour. Après un passage toilettes une nouvelle fois, on fait le max : massage avec beaucoup de baume chauffant, chaussettes de compression, doliprane, tout y passe. Le but est simple : courir le maximum de temps avant de marcher, idéalement jusqu’aux 21 km. Et c’est donc parti pour un marathon, avec une première partie sur les bords de la Danube avant d’aborder quelques montées descentes sur les 15 derniers km. Et la douleur s’estompe au bout de 2km… j’en profite pour garder le rythme prévu, et même un peu mieux, sans négliger aucun ravitaillement, bien sûr. Il y a un monde de fou, une nouvelle fois, et quel plaisir d’entendre tout ça !!! Les kilomètres avancent, les jambes sont bien, les conditions pour le coup sont idéales : un petit vent et une vingtaine de degrés, ça contraste avec beaucoup d’autres ironman ! Je double des centaines de personnes sans baisser de rythme.
Les 21km sont là et mon rythme est parfait… bon ben on continue. Les kilomètres défilent, les doutes disparaissent, les objectifs reviennent. La barre des 11h devient de nouveau envisageable. Je redoute cependant la dernière partie et le 30e km. Mais il n’en est rien : toujours pas de coup de fatigue, de douleur, rien. Peu à peu, l’objectif des 11h se transforme en l’objectif de mon record sur distance ironman, 10h48… puis finalement, dans les derniers km, il se transforme en 10h45. La fatigue est là, bien sûr, mais pas outre mesure. Mon 38e km est d’ailleurs mon meilleur km du marathon !
Le public, massé dans Roth, me donne des ailes. Le passage sous l’arche Red Bull au 40e n’en sera que plus symbolique. Les derniers mètres et l’entrée dans le stade ne sont que pur bonheur, avec une ambiance, une nouvelle fois, démesurée : 3h37 au marathon, record explosé, et 10h44min32s, record battu également.
Quelques heures auparavant, tout ça n’était pas envisageable. Pas une seule seconde je n’aurais pu y croire, miser même un centime sur une telle fin. Mais… comme je le répète sans cesse, il peut se passer 1000 choses sur un ironman, et c’est ce qui rend fabuleux ce genre d’épreuve. 1001 même, avec une telle fin. Un bilan donc super positif malgré tout, et des motifs d’espoir pour la suite !
Pas une fausse note dans l’organisation, 7500 bénévoles, un parcours vélo totalement fermé, des ravitaillements complets et réguliers, des cadeaux sympas et une atmosphère bouillante et indescriptible : Roth était un rêve, ça l’est toujours même après.
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